Le nouveau rapport du Groupe d’experts de l’ONU consacré à la République démocratique du Congo [1] n’est pas encore publié, mais fait déjà couler beaucoup d’encre. En effet, ses révélations incriminent gravement l’armée congolaise ou, du moins, certains de ses plus hauts responsables.
Selon une copie du rapport parvenue à la presse internationale, des éléments des Forces armées de RDC (FARDC) soutiendraient, notamment en munitions et en renseignement, le groupe armé des Allied Democratic Forces (ADF), qui a tué au moins 550 civils depuis la fin 2014 dans la région de Beni (nord du Nord-Kivu). Le général Muhindo Akili Mundos, qui dirigeait l’opération Sokola de lutte contre les ADF, aurait lui-même incité des individus à commettre certains de ces massacres. D’autre part, si les soupçons se dirigent vers les ADF pour toutes les tueries commises dans cette région, les experts de l’ONU pointent aussi du doigt un mystérieux groupe armé composé de rwandophones arrivés récemment d’Ouganda.
Un peu plus au sud, le Groupe d’experts s’inquiète des tensions croissantes entre communautés nande et hutu. Elles seraient partiellement dues à la persistance des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), dont certains membres ont participé au génocide rwandais. D’après le Groupe, les FDLR seraient toujours actives, bien que sérieusement affaiblies, et ne compteraient qu’environ 1.500 combattants répartis dans les deux provinces du Kivu.
Par ailleurs, se basant sur des témoignages d’officiers des FARDC et des observations de terrain, le Groupe affirme que la RDC a importé et équipé sa police et son armée de pistolets provenant de Corée du Nord. En outre, 30 instructeurs nord-coréens formeraient des unités spéciales des FARDC au Congo. Ceci est problématique dans la mesure où la Corée du Nord est sous embargo de l'ONU, ce qui lui interdit d’importer ou d’exporter des armes et de déployer du personnel militaire à l’étranger. En plus, en vertu de l’embargo sur les armes concernant la RDC, les pays exportateurs sont tenus de notifier leurs livraisons au Conseil de sécurité de l’ONU, ce que n'a bien entendu pas fait Pyongyang.
Enfin, les experts affirment que le Rwanda, et particulièrement ses forces armées, est impliqué dans le recrutement et la formation militaire de jeunes Burundais ayant trouvé refuge sur son sol. Après leur instruction, ils recevraient de faux papiers congolais et seraient intégrés dans des groupes armés combattant les forces gouvernementales burundaises à partir de régions frontalières de RDC. Ce soutien se serait poursuivi au début de 2016, en contradiction avec les affirmations de responsables occidentaux selon lesquels il aurait cessé à la fin de l'année précédente.
Notons que ces allégations ont été démenties, à la fois par le général Mundos et par les gouvernements congolais et rwandais.
Sources :
- Exclusive: Rwanda aids Burundi rebels, North Korea arms Congo - U.N. experts [2] (Reuters)
- Grands Lacs : ce que contient le rapport du groupe d’experts sur la RD Congo [3] (Jeune Afrique)
Photo : Un blindé de la force de l'ONU (MONUSCO) près de Beni (© ONU)