La Lettre du RAFAL n° 32 du 22 septembre 2011
Bulletin d’information
du Réseau africain francophone sur les armes légères,
pour la prévention des conflits et la construction de la paix
Edité par le GRIP
Chaussée de Louvain, 467 - B1030 Bruxelles
Tél.: (32.2) 241.84.20 - Fax: (32.2) 245.19.33
Courriel : m.luntumbue@grip.org
Internet : http://www.reseau-rafal.org/
Ed. resp.: Luc Mampaey
Cette publication est réalisée dans le cadre des projets du GRIP sur les armes légères, la prévention des conflits et la construction de la paix en Afrique, avec le soutien du Ministère belge des Affaires étrangères, du Ministère de la Communauté française de Belgique et du Ministère des Affaires étrangères du Luxembourg.


1. Activités de nos membres
Présentation de l’enquête sur la perception de l’insécurité dans l’Est de la RDC
Suite à une étude sur les ALPC en RDC, commanditée par le PNUD, un atelier de présentation a été organisé à Kinshasa le 23 juin 2011, par la Commission Nationale de Contrôle des ALPC (CNC) en collaboration avec le GRIP. Cette étude, sous la forme d’une vaste enquête portant sur la perception de l’insécurité dans l’Est du Congo dans 5 provinces de l’Est de la RDC (Nord Kivu, Sud Kivu, Maniema, Province orientale, Katanga), a fait l’objet d’un livre présenté à l’occasion de cet atelier. (Voir également le point 3, Publications récentes). Des organisations membres du Réseau RAFAL ont pris part à ce séminaire, notamment des représentants de CRiSPAL-Afrique, UCOPASUKI, Securitas-Congo, dont les enquêteurs ont contribué à l’étude menée par le GRIP et le Bonn International Center for Conversion (BICC). L’ouvrage a également été présenté à Bruxelles, le vendredi 23 septembre, dans la cadre de la semaine de la Paix. La semaine de la Paix est une initiative regroupant plusieurs associations belges en vue d’une sensibilisation du grand public et des responsables politiques sur la nécessité d’adopter un traité international contraignant régulant le commerce des armes. L’édition 2011 relie deux rendez clés dans la mobilisation contre la prolifération des ALPC, le 21 septembre (Journée internationale de la Paix) au 2 octobre (Journée internationale de la non-violence).
Formation de journalistes sur les conflits et armes légères en RDC
La dissémination de près de 300 000 armes légères entre les mains de la population civile à l’Est de la RD Congo est l’une de principales cause de violence et d’insécurité dans cette région du pays. La sensibilisation et la formation des leaders d’opinion, membres de la société civile, et acteurs des médias aux impacts de la circulation illicite des ALPC, constitue l’une des stratégies de lutte contre la banalisation de la culture de la violence, et un levier pour des initiatives de désarmement communautaire volontaire. Outre une douzaine de journalistes du Nord et du Sud-Kivu, deux membres du RAFAL, l’ACPD et la CPDH, ont pris part à la formation organisée par le GRIP du 14 au 15 juillet 2011, dans la ville de Goma, à l’attention des journalistes et membres de la société civile.
Troisième comité préparatoire au traité sur le commerce des armes aux Nations Unies
Grâce au financement du projet conjoint GRIP- IANSA, deux membres du RAFAL, Securitas-Congo et la Ligue Iteka (Ligue burundaise des droits de l’homme) ont pris part au troisième comité préparatoire au traité sur le commerce des armes aux Nations Unies. L’Afrique est l’une des régions les plus touchées par la circulation illicite d’armes légères (30 millions d’ALPC), à l’origine d’une insécurité multiforme, qui reste un obstacle à un développement humain harmonieux. Les organisations de la société civile africaine entendent jouer un rôle de premier plan dans la mise en place de stratégies de lutte efficaces contre la prolifération et le transfert illicite des ALPC à l’échelle globale.
2. Actualité des armes légères et de petit calibre (ALPC)
Troisième comité préparatoire au traité sur le commerce des armes aux Nations unies
La réunion préparatoire au Traité sur le commerce des armes (TCA), tenue à New York du 11 au 15 juillet 2011 a vu une participation significative de représentants d’Etats africains et membres de la société civile. Les représentants du continent africain ont soutenu des propositions visant à améliorer les termes du Traité sur le commerce des armes, dont l’adoption est prévue en 2012. Ces propositions mettent l’accent sur l’amélioration du contrôle de la production mondiale d’armes, de leur stockage et de leur commerce ; la mise en place des mécanismes efficaces de dissuasion pour prévenir, combattre et éradiquer le commerce illicite des armes conventionnelles, et éviter ainsi l’instabilité des régions entières par la prolifération des armes légères et de petit calibre illicites, et de l’accès aisé à celles-ci. Voir http://www.aefjn.org/index.php/363/articles/id-1109-african-participation-at-the-third-arms-trade-treaty-preparatory-committee.html
Stratégie de l’UA sur les ALPC et position commune africaine sur le TCA
L'absence de normes communes sur le commerce des armes, en Afrique comme dans le reste du monde, est un facteur d’instabilité pour de régions entières, de conflits et de guerres civiles. Dans la perspective d’adoption du Traité sur le commerce des armes, les pays d’Afrique de l’Ouest se sont en engagés dès février 2011, avec l’appui du Centre Régional des Nations Unies pour la Paix et le Désarmement en Afrique (UNREC) dans un processus visant la définition d’une position Commune africaine sur les enjeux et les opportunités du futur TCA. La CEDEAO avait invité chaque Etat membre à organiser une consultation nationale afin d'adopter une position nationale facilitant par la suite l'adoption d'une position communautaire. Parallèlement, les pays membres Comité consultatif permanent des Nations Unies chargé des questions de sécurité en Afrique centrale (UNSAC) ont adopté, en mars 2011, une Position commune de l’Afrique centrale relative au Traité sur le commerce des armes (TCA). Du 26-30 septembre 2011 les Etats membres de l’Union africaine se réunissent à Lomé, pour élaborer une position Commune africaine qui sera présentée à la conférence de 2012. Cette réunion offre l’opportunité aux organisations de la société civile des différentes sous régions africaines d’apporter les propositions spécifiques de la société civile déjà esquissées à la réunion de juillet 2011 notamment : l’inclusion des armes légères et des munitions dans le champ du futur Traité, la défense d’une position commune permettant de réduire les risques de violation des droits humains et du droit international humanitaire, mais aussi la référence explicite à la violence basée sur le genre.Voir http://www.unrec.org/index/index.php?limitstart=10&lang=fr
Le RECSA appelle à un effort pour la limitation des ALPC
Francis K. Sang, le Secrétaire exécutif du Réseau régional sur les Armes légères, Régional Centre on Small Arms (RECSA), a appelé les pays de la sous-région des Grands lacs et de la Corne de l’Afrique à mettre en place des mécanismes et stratégies de lutte contre la prolifération illicite d’armes légères et de petit calibre. Il s’exprimait en marge de la réunion des chefs de police des pays d’Afrique de l’Est organisée à Kigali au début du mois de septembre. Le RECSA est un organisme intergouvernemental basé à Nairobi, et qui regroupe 13 pays de la région des Grands Lacs et de la Corne de l’Afrique : le Burundi, la RD Congo, Djibouti, l’Ethiopie, l’Erythrée, le Kenya, le Rwanda, les Seychelles, la Somalie, le Soudan et la Tanzanie. Tous les pays membres du RECSA sont signataires du Protocole de Nairobi pour la prévention, le contrôle et la réduction des armes légères et de petit calibre. La mission du RECSA est de coordonner les actions contre la prolifération des armes légères et de petit calibre, dans le but de restaurer la sécurité humaine dans la sous-région. Sans coopération et coordination régionale dans la lutte contre l’élimination des armes légères et de petit calibre, la paix et la stabilité resterons illusoires pour toute la région, estime Francis K. Sang. « La prolifération des armes légères est une menace pour la sécurité nationale, régionale et internationale, un obstacle évident à la prévention des conflits, au maintien de la paix et à un développement durable ». Les 13 états membres sont peu ou prou dotés de cadres législatifs ou de programmes sur la circulation des armes légères et de petit calibre. Le défi, selon Francis K. Sang, reste « l’harmonisation régionale des législations sur les armes légères afin decréer un cadre légal plus contraignant en vue de réduire le problème des armes légères ». Le Rwanda est à ce jour l’un des pays ayant harmonisé leurs législations sur les armes pour les aligner sur les dispositions du protocole de Nairobi. Pour rappel, il y aurait actuellement, selon les données du Small arms survey 30 millions d’armes légères en circulation en Afrique Sub-Saharienne, et 79 pour cent entre les mains de civils. Voir http://allafrica.com/stories/201109160515.html
La législation sur le port d’armes au Rwanda
Selon un haut responsable de la Police nationale du Rwanda en charge de la question des armes légères, la détention d’armes par les civils est autorisée moyennant une demande de permis de port d’arme à la police nationale et payement d’une taxe annuelle. Le port d’armes par les civils est régi par la Loi no. 33 4009 du 18 novembre 2009, renforcée par le décret présidentiel du 30 mai 2011, qui balise les conditions d’octroi d’un permis. La taxe annuelle est fixée à 500,000 francs rwandais pour un particulier (environ 800 dollars US) et à 100,000 (environ 168 dollars US) par arme pour une firme de sécurité privée. Tout particulier détenteur d’une arme doit être âgé de plus de 21 ans et prouver, sur base d’un certificat médical, son état de santé mentale. Le détenteur d’arme doit également jouir d’une bonne réputation dans son milieu de résidence. Ce qui permet d’une certaine manière de prévenir tout usage d’une arme à des fins criminelles. Les particuliers peuvent tenir un commerce d’armes pour autant qu’ils répondent aux conditions de sécurité requises en la matière. Il revient cependant à la police de déterminer la quantité de munitions qui peuvent être exposées à la vente. La possession d’armes automatiques est interdite tant aux civils, qu’aux firmes de sécurité privées. Toutes les armes font l’objet d’un marquage à l’achat, ce qui permet de déterminer les armes détenues légalement des armes détenues illégalement. La détention illégale d’une arme est punissable d’une amende d’1 million de francs rwandais ou de 5 ans de peine de prison. La peine est fixée en fonction des conditions d’acquisition d’une arme ou de son usage. Voir http://allafrica.com/stories/201109170141.html
3. PUBLICATIONS RECENTES
Georges Berghezan et Xavier Zeebroek (coordination), Armes légères dans l'Est du Congo : enquête sur la perception de l’insécurité, Bruxelles,GRIP, juin 2011.
Dans l’Est du Congo, la prolifération des armes à feu a pris des proportions dramatiques avec les guerres de rébellion et la combinaison d’une série de phénomènes connexes : le banditisme, les activités des groupes armés congolais et étrangers, les conflits ethniques, l’indiscipline des forces de sécurité, l’exploitation illégale des ressources naturelles, alimentant une spirale de pauvreté et d’inégalités... Nombreux sont les civils à être maintenant armés, que ce soit pour dans un but de protection ou dans une logique de prédation. Le PNUD lutte depuis de nombreuses années contre le fléau des armes légères en RDC. C’est dans ce cadre qu’elle a mandaté deux instituts, le Groupe de Recherche et d’Information sur la Paix et la sécurité (GRIP) et le Bonn International Center for Conversion (BICC), pour mener l’enquête. Dans les provinces du Nord et Sud-Kivu, du Maniema, et dans les districts de l’Ituri (Province Orientale) et du Tanganyika (Katanga), quelque 10 000 ménages ont ainsi été sondés et plusieurs dizaines de discussions de groupe ont été organisées. La première partie de l’ouvrage analyse le contexte sécuritaire de la région investiguée : l’évolution des conflits récents, la multiplication des bandes armées, les aspects législatifs, les actions des Nations unies et du gouvernement congolais, les perspectives de désarmement. La deuxième présente les résultats de l’enquête et représente une mine d’informations inédite sur les armes légères : qui les demande, qui en possède, ou les cache-t-on, quelle utilisation en est faite, comment sont-elles perçues et quel est leur impact ? Toute la région a été passée au crible… Une étude minutieuse qui devrait servir à élaborer les futures politiques de réduction de la violence armée dans l’Est du Congo !
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