Ce mardi 2 avril, l'Assemblée générale de l'ONU a adopté, à une large majorité, une résolution ouvrant à la signature le premier traité sur le commerce international des armes conventionnelles (TCA). L’objectif de ce traité est d’obliger chaque pays à évaluer, avant toute transaction, si les armes vendues risquent d’être utilisées pour contourner un embargo international, pour commettre un génocide et d’autres exactions contre la population civile, ou d’être détournées au profit de terroristes ou de criminels. Les armements couverts vont du pistolet aux avions et navires de guerre en passant par les missiles, soit toute la gamme des armements, du plus léger au plus lourd, à l’exception des armes nucléaires, bactériologiques et chimiques déjà réglementées par d’autres conventions internationales.
Le TCA n’avait pas pu être adapté au consensus général des 193 pays membres de l’ONU, la semaine dernière. Trois pays avaient bloqué : l’Iran, la Corée du Nord et la Syrie. Ces trois pays ont voté contre le texte à l’Assemblée général, tandis qu’une vaste majorité de 154 Etats l’a approuvé et que 23 se sont abstenus, dont la Russie, la Chine, l’Inde, l’Egypte, l’Arabie saoudite et le Soudan. Le TCA doit à présent être signé et ratifié par chacun des pays. Il entrera en vigueur à la 50ème ratification, ce qui devrait prendre au moins deux ans.
C’est suite à une campagne de Prix Nobel relayés par de nombreuses ONG que les Nations unies ont organisé en juillet 2012 une première conférence visant à réguler le commerce des armes, sans que celle-ci ne débouche sur un accord global. De nouvelles négociations se sont ensuite ouvertes, toujours sous l’égide des Nations unies, au mois de mars, mais les 193 membres ont dû se séparer sur un constat d’échec au bout de dix jours de tractations à New York (voir La Lettre du RAFAL n° 46 [1]).
La Russie a justifié son abstention en pointant du doigt un certain nombre de lacunes dans le texte du traité, dont l’absence de contrôle spécifique des livraisons d’armes aux groupes rebelles comme en Tchétchénie ou en Syrie. L’Inde a adopté une position similaire, qualifiant en outre ce document de « déséquilibré », car il privilégierait les exportateurs au détriment des importateurs et permettrait aux premiers d’annuler unilatéralement des contrats de livraison d’armes sur la base de soupçons souvent invérifiables. Enfin, les Etats-Unis, qui ont obtenu que les munitions bénéficient de contrôles moins complets, ont, certes, voté en faveur de la résolution. Mais le dernier mot reviendra au Congrès américain, lorsque son tour viendra, de ratifier l’accord international.
Considérée comme « historique » par de nombreuses organisations non-gouvernementales, cette adoption marque une première étape dans la moralisation du commerce international des armes. On ne peut cependant que regretter les limites du texte. Sous plusieurs aspects, les balises adoptées par des organisations régionales ou sous-régionales (Position commune de l’UE, Convention de la CEDEAO, Convention de la CEEAC…) sont en effet nettement plus audacieuses. Mais il s’agissait sans aucun doute du prix à payer pour que la résolution soit adoptée par une vaste majorité d’Etats.